Un
froissement a déchiré les lambeaux de mon sommeil. Il fait bon et doux sous la
couette. Le réveil me désoriente, il me faut un moment pour regagner le monde
des vivants. Dans la blême lueur de ce matin d’automne mon corps me parait lourd
et tendu. Je referme les yeux pour dissiper les derniers voiles de mes rêves.
Un glissement se produit à mes côtés. Le chat, déjà, venu réclamer sa
pitance ? Une main vient se poser sur ma cuisse. Les doigts sont
légers et ma jambe semble pesante, et
terriblement poilue. Il y a une femme, plutôt jeune, dans le lit. Je ne me
souviens pas d’elle, mais elle partage la même tiédeur paresseuse et son geste
indique entre nous une intimité.
Je reprends
lentement conscience de mon corps, je me réintègre. L’inconnue me caresse. Elle
a des cheveux blonds mi-long étalés sur l’oreiller, je ne vois pas son visage.
Elle progresse vers mon aine et s’empare d’une belle érection matinale. Il faut
croire que nous nous connaissons assez bien. Mes tétons se durcissent à me faire
mal. La diablesse enveloppe mon gland, le titille avec douceur. Je pose une
main sur une hanche délicate. Il y a des rondeurs bien appétissantes par
là-bas. J’approche ma bouche de la courbe de son épaule et je dépose un baiser
mordillant près de son cou. Un soupir répond à l’invite, sa main s’empare de ma
queue. Ah, c’est bon ! je vais à la rencontre d’une toison soigneusement
élaguée. Sa cuisse s’écarte un peu pour me livrer un passage, et je pars en
expédition dans de sensibles moiteurs. Elle enveloppe mon sexe de
va-et-vient languissants. Je parcours avec tendresse des lèvres humides, un
clitoris qui semble, lui, bien réveillé, petit bouton tout dur sous la pulpe
prudente de mes doigts. J’entends un souffle plus long échapper de ma voisine.
Apparemment, elle aime. Sans cesser mes cajoleries, je captive un sein, et je
prends un téton dans la bouche. Elle n’a toujours pas tourné la tête, mais son
souffle s’accélère, s’approfondit encore. Mon index se faufile dans son vagin,
mon pouce effleure toujours son clitoris. Majeur vient rejoindre son frère
et nous patinons dans la cyprine. Elle est dans de bonnes dispositions, ma
compagne anonyme. Qu’à cela ne tienne, je le suis aussi. J’échappe à sa main
diabolique et je plonge une langue triomphante où j’ai mis mon pouce. Elle
gémit. Je goûte à la douceur de ses lèvres, texture souple, parfum animal et
salé. Il me semble que mes papilles se hérissent, que ma langue devient un peu
râpeuse, un peu sauvage, envahissante. Je décris des huit à l’intérieur de sa chatte,
je picore son petit bouton, je le prends dans ma bouche pour l’agacer de plus
près. Un tremblotement dans ses jambes m’annonce un orgasme, et la belle
s’abandonne dans un halètement. J’ai plus que jamais la gaule, mon envie de
pisser ravalée au rang des détails futiles. Je pose un baiser barbouillé de
mouille sur son nombril, elle rit doucement. Elle a l’air heureux, maintenant
que je peux voir son minois. Des yeux noirs ou marron très foncés, un visage
clair, ouvert, de jolis plis au coin du regard, près de la bouche. Elle rigole
plus souvent qu’elle ne fait la moue. Elle a une délicieuse fossette, une
seule, en bas de la joue droite.
Elle se
redresse, m’allonge, et enjambe ma tête. Elle a visiblement envie que je
recommence. Je replace mes deux doigts dans son vagin, ma langue revient se
poser sur son clitoris. Mon pouce vient toquer à son petit trou. D’un
grognement, elle approuve. Bien, on va être très amis tous les deux. Sa bouche
enserre mon gland et glisse ma queue vers sa glotte. Le velours humide de son
palais et de ses joues coulisse le long de ma queue, elle musarde, me ressort,
lèche lentement la longueur de mon sexe, s’attarde sur la couronne de mon
gland, promène une langue espiègle sur mon bout. En même temps, elle écartèle
des lèvres dégoulinantes au-dessus des miennes, elle se cambre sur mon doigt
coulé dans son anus. A mesure que ma gloutonnerie gagne son petit intérieur,
elle m’engloutit, me gobe, elle s’aide de la main, écarte les doigts pour m’avaler
plus profond. Ah, sorcière ! c’est que tu sais donner du bonheur, toi. J’ai
d’autres prétentions. Mes deux mains sur ses cuisses donnent le signal de la
relève. Docile, elle pivote et vient empaler son ventre gourmand sur ma queue.
Danse, enchanteuse inconnue, danse mon désir et le tien. Je sens le fourreau de
tes muqueuses accueillantes s’écarter sur mon sexe planté dans ton corps,
prends-moi entier, cueille-moi dans les profondeurs embrouillées de ta
fiévreuse cavité. Sens comme nous nous emboîtons bien. Serre tes muscles,
retiens-moi et laisse-moi glisser comme à regret pour me saisir à nouveau, m’absorber
encore, encore, encore. Et tandis que je m’abîme, tu sombres dans les cieux.
Combien y en a-t-il déjà ? Sept ?
L’orgasme la
saisit et étrangle mon sexe. Je sens le goulet d’un spasme enserrer mon abdomen.
Pas maintenant, ensorceleuse, pas maintenant. Elle glisse pantelante, dans les
crispations de son acmé. Elle me libère et gît, soufflet d’une forge encore
brûlante. Je caresse son visage émerveillé. En quelques souffles, elle se
redresse, s’agenouille et me présente une croupe rebondie. Ah, diablesse,
visiter à nouveau tes moiteurs ! Je m’enfonce à délices dans son sexe
ouvert. Mon pouce vient agacer sa petite porte d’entrée. Je veux ton
étroitesse et ses constrictions, je veux ton cul, démone. La tête sur le
matelas, elle plaque deux mains décidées sur ses fesses, les écarte. L’invitation
est claire. Je place mon gland inassouvi contre son anneau brun et je m’introduis
lentement. Elle pousse un long soupir et tend un peu plus son cul résolu vers
ma queue. Ah l’étreinte incomparable de ton cul ! Les affres de ton
plaisir suspendu au risque de la douleur, la détresse de ton ventre envahi et
offert. Je goûte ton souci jusqu’à la lie, je plaide pour nos voluptés communes
à grands coups de reins. Prends et donne sur le fil de ton désarroi. Et du
tréfonds de mes couilles à la transe de mes muscles bandés, je sens monter une
crue furieuse. Mon ventre lutte et se soumet, je glisse et je me cramponne à
tes rondeurs impatientes, et j’explose dans le sanglot de tes dernières
convulsions. Aveugle, sourd, insensible, tout entier résumé à mon bout de chair
gorgé de sang et de sperme, planté dans tes humeurs goulues, je me suspends à
ces quelques secondes de plaisir et je perds pied, tête et raison.
Je me
réveille au son languissant de la radio. A mes côtés, des cheveux blonds s’étalent
sur un oreiller. Deux yeux presque noirs et un sein matinal me contemplent en
souriant.
-- Tu
as bien dormi ? Tu t’agitais beaucoup.
--- Un
rêve. Tu sais quoi ? Tirésias a menti.
-- Drôle
de réflexion au réveil, de quoi parles-tu ?
-- Tirésias,
le devin, fut changé en femme pour sept ans, sa punition pour avoir séparé deux
serpents qui s’accouplaient. A l’issue de son châtiment, il fut appelé à
arbitrer une querelle entre Zeus et Héra. L’un prétendait que les femmes tirent
plus de plaisir de l’acte charnel, l’autre que ce sont les hommes. Tirésias
avait fait l’expérience des deux, on lui demanda donc son avis. Il répondit que
ce sont les hommes. Il flattait Zeus, tout en donnant raison à Héra.
-- Pourquoi
me racontes-tu ça, de bon matin ?
-- Parce
qu’il a menti. J’en suis sûre maintenant.
Un délicieux récit dont la chute (bien que légèrement "spoilée" par le titre) me fait penser à Anne Archet !
RépondreSupprimerMerci pour la référence !
RépondreSupprimerJ'ai triché, en fait. Dans le mythe, c'est à Zeus que Tirésias donne raison, validant que le plaisir féminin est supérieur à la jouissance masculine. Furieuse, Héra l'aveugle. Le don de voyance était une consolation accordée par Zeus.