J'aime bien les adultères. J'aime bien ton adultère, celui dont je
me suis rendue complice. Cela te faisait grimacer. Et puis j'ajoutais que je ne
trompe personne, pas même toi. Enfin si, il m'est arrivé de me taire. Mais toi,
tu ne pouvais pas me reprocher de fréquenter d'autres draps, même si cela ne te
plaisait pas.
J'ai redécouvert le flirt à l'ancienne, celui où on échange les
mots d'esprit et les allusions osées, dont tu t'excusais aussitôt. Tes mots me
faisaient frémir, tes excuses, sourire. Je parcourais la carte d'un Tendre un
peu salace au long de tes messages. Dans ton répertoire, je crois que je
m'appelais Bruno. Je t'ai interdit certains prénoms. Même au masculin, il y a
des noms qui ne me vont pas. Ton surnom était tout trouvé, à cause du mien.
J'ai adoré la vue somptueuse et très privée que tu m'as offerte un
soir, sur le château. Une soirée un peu magique, comme tu sais en
inventer. J'ai aimé aussi ta soif de tendresse, moi qui déteste les simulacres.
Mais tu es sincère en tout, jusqu'à la brutalité. Que ta vie soit aussi réglée
et que rien n'y puisse y changer, cela me tranquillisait. Dans d'autres
circonstances, tu m'aurais harponnée, et tu m'aurais embastillée. Je crois même
que j'aurais pu aimer ça, un moment.
Tu avais besoin de plaire, tu m'as charmée pendant des jours. A
nos emmêlements, tu as cédé comme on se rend. Tu as parcouru avec avidité
chaque centimètre carré de peau, ôté avec vénération chaque gramme de tissu,
jusqu'à ce qu'il ne reste entre nous que l'évidence de nos épidermes. Et là, tu
as déposé tes hommages à mes pieds gelés. Tu as poursuivi du bout des doigts
tes phrases cajoleuses et lascives. Tu sais mettre de l’élégance dans les
exigences de ton désir. Ce que j’ai caressé, léché, engouffré, tu ne me l’as
pas offert, je te l’ai pris.
Il fallait ouvrir une voie à tes redditions. Tu ne te donnes pas. Tout
ce que tu as, il faut te l’arracher. Lambeau après lambeau. Et pantelant, abandonné
devant moi, tu frémissais encore de tes capitulations. La férule construisit
entre nous une étrange alchimie. J’ai cherché mes limites, guetté les tiennes.
Trouvé un creuset où déposer la poudre artifice d’un ultime embrasement. Quand
j’ai senti dans ma chair la sauvage grâce de ta peine, quand le plaisir rossé a
ravagé mes nerfs, j’ai su qu’il fallait te perdre, ou m’abîmer.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire